Projet Lauréat PSL-Columbia 2018 :
Le rapprochement franco-russe qui s’esquisse dans les chancelleries à partir de 1887 attire au Congrès archéologique international de Moscou une petite délégation française dès 1890. C’est le début d’un “tropisme russe” qui va affecter l’ensemble des disciplines scientifiques françaises. Tandis que sont créées des chaires de langue russe à l’université de Lille et à la Sorbonne, historiens, archéologues, ethnologues nouent des contacts avec leurs collègues russes. L’alliance militaire conclue en 1894, cimentée par les emprunts russes, largement couverts par les épargnants français, accélère encore ce mouvement, tandis que parallèlement la Russie construit le Transsibérien, une des entreprises d’ingénierie majeures de cette époque. Les visites du tsar Nicolas II (1896, 1901, 1909) et l’exposition universelle de 1900 sont vécues comme des moments majeurs de la vie culturelle et scientifique de l’époque. Le ministère de l’Instruction publique finance régulièrement des missions dans l’Empire russe. Officiels (A. Rambaud), scientifiques reconnus (S. Reinach, A. Mazon) et collectionneurs sillonnent la Russie, jusqu’au déclenchement de la Première Guerre mondiale, et parfois au-delà, comme Joseph de Baye qui fera son plus long séjour dans le contexte extraordinairement difficile des années 1914-1920. L’étude mobilise les archives documentaires et photographiques des missions, en France et en Russie, les collections déposées dans les musées français, les épilogues de ces relations dans l’émigration russe, à Prague, à Berlin ou à Paris. Elle reconstitue les réseaux scientifiques tissés avant la Révolution, parfois renoués après (dans l’émigration ou en URSS). Elle s’intéresse aux institutions muséographiques de l’époque, aux collections privées, aux publications d’inventaires et à la constitution des savoirs.